Kareen entra dans l'écurie, dans l'après midi, le ciel parsemé de flocons et recouvert d'un épais brouillard secoué par le vent. Elle s'approcha du box, caressa l'espagnol gris clair, entra et fut accueillie par un joyeux petit hennissement semblable à un ronflement. L'adolescente passa le licol à l'étalon, l'attacha, et commença à passer l'étrille métallique, lorsque celui ci hennit, puis fit un demi-cabré. Immédiatement, Kareen détacha l'entier, le caressa, le rattacha puis lui dit :

- Je crois qu'on va éviter l'obstacle aujourd'hui.... On va faire du dressage, ça va te calmer un peu.

Une fois le pansage terminé, déroulé sur un Hélios tout content, les oreilles en avant, poussant un petit hennissement joyeux parfois, La jeune blonde se dirigea vers la sellerie, mit tapis, bandes de travail, selle, couvre reins et bride de dressage en un rien de temps, puis se dit qu'elle pourrait faire le chemin à cheval, si elle se montrait prudente et amener une lampe torche pour y voir clair. Elle mit alors ses gants, sa bombe, fixa sa lampe torche sur sa bombe, prit son stick, se hissa sur le dos de l'étalon et pris la route menant à la nationale, sur le bas-côté.

Le chemin se déroula à merveille car, marchant sur le bas-côté de la route, l'étalon était calme, les voitures roulant à 20 km/h afin de ne pas se perdre dans le brouillard grisonnant. Par contre, à chaque fois qu'un véhicule roulait à proximité de l'espagnol, il commençait à ronfler et à montrer des signes de nervosité, que sa cavalière calmait rapidement. Enfin, après 15 minutes de route, Kareen distingua le toit du manège, grand carré de sable et de bois. Elle poussa la porte du manège, resangla et mit directement sa monture au trot, dans un trot de travail léger et aérien, sa cavalière le forçant de jouer avec son mors, afin qu'il se place de lui même. Deux minutes plus tard, il consentit à mettre le nez quasiment dans le poitrail, et sa cavalière lui fit faire des doublers dans la longueur et dans la largeur, allonger ou rassembler le trot, ainsi que des cercles, des diagonales et des transitions descendantes, toujours dans un trot calme et léger, avec un cheval détendu, attentif et à l'écoute. Après l'avoir fait trotté aux deux mains, l'adolescente repassa l'étalon gris clair au pas, plaça ses aides, lança son cheval au petit galop sur un cercle de 20 m, dans un galop rythmé, cadencé et léger, fit une diagonale, fit changer de pied l'étalon, et le remit sur un cercle au galop, à l'autre main cette fois-ci. Elle reprit la piste, et tout d'un coup, l'espagnol leva la tête, embarqua sa cavalière au galop, décrochant ruades, coups de culs et sauts de mouton. Ce manège dura plusieurs minutes, Kareen s'efforçant de rester dessus, s'accrochant à la crinière et cassant les dents de l'étalon. Mais celui-ci ne voulait rien entendre : il continua à galoper, se débattant encore plus, secouant sa fine tête grise clair et sa crinière blanche et frisée. Enfin,la jeune blonde, à bout, à moitié en pleurs, prit les rênes au mors, tira dessus, et cria :

- STOP !! STOOOOP !!!

L'étalon, surpris par la réaction de sa cavalière, s'arrêta net, et la regarda avec l'air de dire "Qu'est-ce que j'ai fait ? ", puis elle se redressa, remit son étalon au pas, serra ses jambes et le refit démarrer au galop. L'étalon, ayant compris qu'il avait fait une bêtise, fut sage comme une image, se plaçant immédiatement, réagissant à toute réaction de sa cavalière. Celle-ci, ayant repris un peu confiance, fit travailler son étalon sur les cessions à la jambe, qui se comporta comme un ange, son côté démoniaque comme envolé. Il exécutait tout se que demandait sa cavalière, mieux qu'il ne l'avait jamais fait. A la fin de la séance, l'adolescente fit travailler une fois l'espagnol au passage, et elle obtenu un trot merveilleusement rassemblé, presque sur place, un passage parfait. Elle arrêta Hélios, dessangla, le fit marcher rênes longues, lui ébouriffa le toupet et lui dit :

- Tu sais que je t'aime ma tête de mule ? Un jour ange, un autre démon, ou les deux parfois. Tu as très bien travaillé aujourd'hui, enfin, au début et à la fin, surtout pas au milieu !

Elle descendit, remonta ses étriers, et appela son chauffeur pour qu'il vienne avec le van et la mercedes, afin de les ramener, Hélios et elle, au haras, car elle était trop fatigué et son étalon trop épuisé d'avoir galopé comme un taré pour rentrer à cheval, en marchant le long de la nationale.